Le 8 avril, le président malgache a créé la surprise en annonçant qu’un remède à base de plantes cultivées sur l’île était susceptible de soigner les malades du coronavirus. Des expériences cliniques sont actuellement en cours sur des patients volontaires atteints du Covid-19. Si cette annonce a ravi une bonne partie de la population, les scientifiques malgaches, bien qu’optimistes, ont accueilli cette prise de parole avec beaucoup de gêne.
« Nous pouvons changer l’histoire de Madagascar et du monde entier. »
C’est par ces mots qu’Andry Rajoelina a pris tout le monde au dépourvu
mercredi dernier. Quelques jours plus tôt, des spécialistes français
d’une plante médicinale qui pousse sur l’île le convainquent des vertus
prophylactiques de celle-ci contre le virus mondial. Dans la foulée, le
président annonce que « Madagascar possède le remède qui peut combattre
le coronavirus. Et on va le prouver », affirme-t-il.
Depuis quelques jours, les essais cliniques ont démarré. C’est le Centre
national d’application de recherche pharmaceutique (CNARP) en
collaboration avec les ministères de l’Enseignement supérieur et de la
recherche ainsi que celui de la Santé qui piloteraient le projet. Mais à
la présidence, comme dans le cercle restreint de scientifiques
concernés, personne ne souhaite commenter, tant le sujet est sensible.
À l’instar de Charles Andrianjara, le directeur général de l’Institut
malgache de recherches appliquées (IMRA) : « La recherche est en cours,
mais c’est hyper confidentiel. Je ne peux rien dire du tout à ce sujet. »
« Il faut y aller doucement »
Dans le
milieu scientifique, l’annonce spectaculaire a provoqué des sentiments
mitigés. « Aucun président africain n’avait jamais fait une telle
promotion des plantes médicinales », se félicite un chercheur. Un vrai
coup de projecteur, donc, pour motiver les recherches.
En
revanche, d’autres regrettent l’effet d’annonce et les paroles quasi
messianiques employées par le président. « Dans la recherche, il faut y
aller pas à pas », affirme l’un d’eux. « Même si l’urgence sanitaire
permet de sauter quelques étapes, il faut que nous puissions apporter
des preuves tangibles. »
Aussi, même si les espoirs sont
grands puisque certains principes actifs de plantes ont d’ores et déjà
fait leurs preuves pour soigner la grippe virale dans le pays, « rien ne
nous permet à l’heure actuelle », explique un autre chercheur « de
conclure concernant les effets bénéfiques de ces phyto-médicaments sur
le Covid-19. »